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À Atakpamé, le vétérinaire de l’âme : l’histoire du Dr Théophile Komlan M. Kassamada, artisan d’un miracle au quotidien.

mai 13, 2025 0 912

Agbonou, mai 2025 – Sur le bord d’un carrefour poussiéreux d’Atakpamé, les klaxons résonnent, les motos zigzaguent, et les cris des marchands flottent dans l’air chaud. Mais derrière un portail modeste, dans une bâtisse discrète, se joue depuis trois décennies une autre musique : celle de la vie qui revient, du souffle qui repart, des bêtes qui guérissent… et des familles qui respirent.

Le Centre Vétérinaire du Carrefour (CVC), fondé en 1994, fête ses 30 ans. Mais cette fête n’a rien d’un feu d’artifice. Elle est simple, sobre, à l’image de celui qui en est l’âme : le Dr Komlan M. Kassamada.

Quand il pose ses valises à Agbonou au milieu des années 90, tout le monde le prenait pour un rêveur. Qui viendrait soigner des chèvres ou des poules dans un coin où les gens peinent à se payer un simple comprimé de paracétamol ? Lui, il ne répond pas. Il agit. Il soigne, même quand on ne peut pas le payer. Il enseigne, même quand personne ne l’écoute. Il persévère, même quand tout semble perdu.

« Il parlait aux animaux comme à des personnes », raconte une vieille habitante du quartier. « On aurait dit qu’ils le comprenaient. »

 Un local prêté, quelques médicaments dans une caisse en bois, et beaucoup de prières. Voilà à quoi ressemble le début du CVC. Chaque jour, Dr Kassamada arpente les villages, parle de prévention, d’hygiène, de soins. Il gagne peu, mais il gagne la confiance.

Et peu à peu, l’évidence s’impose : cet homme ne fait pas que soigner des bêtes, il soigne des vies.

Aujourd’hui, le Centre Vétérinaire du Carrefour, c’est :

- Une équipe de huit professionnels,

- Une trentaine d’animaux traités chaque semaine,

- Une pharmacie bien approvisionnée,

- Une pépinière de jeunes stagiaires formés,

- Et bientôt, un laboratoire d’analyses vétérinaires.

Mais ce sont surtout des centaines d’histoires derrière chaque animal sauvé. Comme celle de cet éleveur qui a pu scolariser ses enfants grâce à un troupeau sauvé. Ou cette jeune fille, aujourd’hui technicienne vétérinaire, qui a fait ses premiers pas ici comme bénévole.

À ceux qui le félicitent, Dr Kassamada oppose un sourire discret :

« Ce que je fais, je ne le mérite pas. C’est une grâce. J’ai juste répondu à un appel. »

Son cabinet, c’est aussi une école de compassion, un lieu de confiance où chaque client est reçu avec la même attention, qu’il vienne avec un chien de race ou une poule en fin de vie. 

Un habitué confie :

« Ici, on ne soigne pas que des animaux. On soigne aussi les âmes. »

À l’heure où beaucoup rêvent de succès rapides, Dr Kassamada incarne une autre voie : celle de l’ancrage, du service, de la foi en l’autre. Il n’a jamais quitté Atakpamé, parce que pour lui, ce carrefour n’est pas un point de passage. C’est un lieu d’engagement. Et ce trentenaire du CVC ? Ce n’est pas une fin, mais un point-virgule. « Je suis encore en chemin », dit-il. « Tant qu’il y aura un animal à soigner, une personne à écouter, je resterai. »

Jean-Marc EDRON

Last modified on mardi, 13 mai 2025 10:23

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